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LES OBLIGATIONS DE SURVEILLANCE ET DE VIGILANCE EN APPLICATION DU CONTRAT D’HOSPITALISATION

LES OBLIGATIONS DE SURVEILLANCE ET DE VIGILANCE EN APPLICATION DU CONTRAT D’HOSPITALISATION

Temps de lecture : 3 min.
Auteur : Jean-Christophe Boyer
Publié le : 07/11/2025 07 novembre nov. 11 2025

CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 20/02/2025, 23BX00259


Le contrat d’hospitalisation en droit public impose à l’établissement hospitalier un ensemble d’obligations visant à garantir la sécurité et le bien-être des patients.

Parmi ces obligations, la surveillance et la vigilance occupent une place centrale, particulièrement dans le contexte de l’organisation des soins et de la prise en charge des patients. Ces obligations sont de nature variable, en fonction de l'état de santé du patient, de ses antécédents, et des moyens dont dispose l'établissement hospitalier.

Faits :

M. A. N. E., né le 1er janvier 1983 en Haïti, a été hospitalisé à Basse-Terre, puis transféré au centre hospitalier Louis-Daniel Beauperthuy (CHLDB) pour traitement d'une maladie infectieuse.

Un dimanche, sa disparition a été constatée par le personnel soignant. Malgré les recherches diligentées notamment par les services de gendarmerie, M. A. N. E. n'a jamais été retrouvé et par jugement, le tribunal judiciaire de Basse-Terre, saisi par sa famille, a déclaré son décès. Sa famille a saisi le tribunal administratif de la Guadeloupe d'une demande indemnitaire visant à la réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de sa disparition

Discussion :

Les requérants soutiennent que la disparition de leur proche résulterait d'un défaut de surveillance constitutif d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service hospitalier

Il faut tout d’abord rappeler que l'article L. 1142-1 du code de la santé publique dispose que:
«  I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) »

Il faut encore ajouter que l’obligation de surveillance en droit public est qualifiée d’obligation de moyens. Cela signifie que l’établissement hospitalier doit déployer les efforts nécessaires et appropriés pour prévenir les risques, sans pour autant être tenu à une obligation de résultat.

Cette obligation s'apprécie en tenant compte de plusieurs critères, tel que les moyens dont dispose l’établissement, notamment en fonction de ses caractéristiques et de ses contraintes mais également l’état de santé et les spécificités du patient, y compris ses antécédents et sa pathologie sont pris en compte.

Pour apprécier l'existence d'une faute ou non dans l'organisation du service public hospitalier au titre du défaut de surveillance d'un patient, la cour d’appel a donc tout logiquement rappelé qu’elle doit tenir compte de l'état du patient, du risque que cet état lui fait courir, du caractère prévisible de ce risque mais aussi des pouvoirs dont disposait le service ainsi que des mesures qu'il devait prendre, compte tenu de ses caractéristiques et des moyens dont il disposait.

Or, en l’espèce, il n’a pas été établi que l'état de santé de l'intéressé, hospitalisé dans le service de soins de suite du CHLDB pour une infection par le VIH, et non dans un secteur psychiatrique, qui aurait pu nécessiter une surveillance particulière de la part du personnel soignant.

En outre, il résulte de l'instruction que ce patient décrit comme " affaibli " par le directeur des soins du CHLDB, n'avait par le passé ni fait une tentative connue de fugue, ni manifesté, à aucun moment, son intention de quitter le centre. Enfin, les témoignages recueillis pendant l'enquête suggèrent qu'il serait parti pieds nus, ce qui ne permettait pas de supposer une intention de quitter le centre, où il pouvait circuler librement.

L’appréciation des faits par la Cour d’appel est dans la droite ligne de la jurisprudence. On peut en effet rappeler que le droit positif retient qu’un défaut de surveillance conduit souvent à une condamnation lorsque le comportement du patient était prévisible. (CE, 23 déc. 1981, no 18345 : D. 1982, IR, 444 CAA Lyon, 19 nov. 1998, no 97LY02565 CE, 9 mars 2009, no 303983 CAA Marseille, 2e ch., 17 juin 2013, no 11MA00769 CE, 18 juin 2018, no 411049.)

Dans ces conditions, la cour d’appel a en toute logique considéré que CHLDB n’a pas manqué de vigilance lors de la prise en charge de M. A. N. E. ni même manqué à un devoir de surveillance.

Historique

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